CONSULAT
GENERAL DE FRANCE A QUEBEC
SERVICE
DE PRESSE ET DE COMMUNICATION
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TRIBUNE
DU MINISTRE DELEGUE AU BUDGET
ET A LA REFORME DE L'ETAT,
PORTE-PARLE DU GOUVERNEMENT,
M. JEAN-FRANCOIS COPE,
DANS LE QUOTIDIEN "LES ECHOS" |
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(Paris,
17 octobre 2005) |
"L'herbe n'est pas toujours plus verte
chez le voisin"
Mercredi 5 octobre. Dans
l'avion qui m'emmène aux Etats-Unis, pour une visite de
quatre jours, autant le dire franchement : je me pose
quelques questions. Parti pour vendre l'image d'une France
moderne aux Américains et découvrant les titres de la presse
locale, je me dis que ça ne va pas être facile. "Encore une
journée nationale de grève", "Attentats en Corse", "La
France veut empêcher Hewlett-Packard de licencier".
Ce déplacement à Boston,
Washington et New York n'a donc qu'un objectif : tordre le
cou aux clichés qui circulent sur notre pays et dire aux
responsables politiques, aux hommes d'affaires américains et
aux Français installés sur place que la France bouge, même
si beaucoup reste à faire.
Première étape de mon
déplacement et premier choc : Boston. Le public a vingt ans.
Je dois prononcer deux conférences devant de jeunes
étudiants, l'une sur l'avenir de l'Union européenne au
Massachusetts Institute of Technolohy et l'autre sur les
relations franco-américaines à l'université de Harvard.
Parmi les auditeurs, des
Américains, des Hispaniques mais... surtout des Français.
Ils sont brillants, diplômés de nos meilleures écoles
d'ingénieurs et de commerce, et tous très au fait de notre
vie politique. A leur âge, ils n'hésitent pas à poser les
questions qui fâchent. Je suis venu avec un seul message :
"C'est bien d'aller poursuivre ses études à l'étranger, ou
même d'y travailler quelques années, mais, après, je vous
demande de revenir en France. Votre pays a besoin de vous".
Ce message les surprend
mais, autant l'avouer, il ne les convainc pas totalement. Il
faut dire que la tentation est grande de rester là-bas.
Après mon intervention, une jeune Française d'Harvard me
prend à part et me dit : "C'est la première fois qu'un
ministre me demande de revenir en France et je vais
téléphoner ce soir à mon père pour tenter de le convaincre".
Mais qu'a pu dire ce père à sa fille pour lui mettre en tête
que son avenir n'était pas en France ?
Donner à ces jeunes
expatriés l'envie et les moyens de faire carrière dans notre
pays doit vraiment être une de nos priorités. Si certains
veulent s'établir à l'étranger pour des raisons
personnelles, qu'ils le fassent. Ils seront, comme ces
Français de New York que j'ai rencontrés plus tard au cours
de mon voyage, les vitrines de notre réussite. Boulangers,
restaurateurs, ingénieurs, cadres, financiers : autant de
symboles du savoir-faire français qui s'exporte. Mais ce ne
doit plus être un choix par défaut.
En trois jours et plusieurs
dizaines de rencontres, j'ai pu d'ailleurs constater le
décalage entre l'image de la France aux Etats-Unis et la
réalité : l'image d'une France pacifiste, alors que nous
avons 35.000 soldats déployés aux quatre coins du monde,
l'image d'une France paresseuse, alors que la France est le
premier des grands pays en termes de productivité horaire,
l'image d'une France qui vieillit, alors que nous avons la
plus grande vitalité démographique d'Europe, l'image d'une
France en grève, alors que nous avons l'un des taux
d'absentéisme les plus faibles de tous les pays
industrialisés.
Et là j'ai compris. J'ai
compris en donnant une interview à Washington pour la chaîne
CNN, quand j'ai fait sourire le journaliste à qui
j'expliquais qu'un plafond fiscal de 60 % venait d'être
introduit en France. "60 % d'impôts, je ne suis pas sûr que
les Américains apprécieraient !" Il était pourtant le
premier surpris quand je lui ai appris qu'en France,
l'éducation et la santé étaient gratuites et la retraite
prise en charge collectivement. Car il faut bien se rendre
compte que les familles américaines doivent souvent épargner
vingt ans - quand elles en ont la possibilité - pour avoir
droit à des services équivalents.
J'évoquais ce sujet avec
Alan Greenspan, le patron de la Réserve fédérale américaine,
en lui faisant part des difficultés que nous avions eu à
réformer nos retraites. En mon for intérieur je me disais :
au moins un sujet sur lequel nous sommes en avance sur les
Etats-Unis.
A partir de là on peut
toujours continuer à être morose, à se plaindre de tout, à
se dire que l'herbe est plus verte chez le voisin. Moi, je
crois justement que c'est ici que tout est possible, si l'on
s'en donne les moyens.
Tout est possible car la
France est un pays d'entreprises et d'entrepreneurs, ouvert
sur le monde : 2,5 millions d'entreprises, des leaders
mondiaux dans tous les secteurs de l'économie, des managers
internationaux, hommes et femmes, reconnus et respectés. Un
grand patron américain me rappelait que les entreprises
françaises emploient autant de salariés aux Etats-Unis que
les entreprises américaines en France, soient un
demi-million de personnes !
Tout est possible car le
modèle industriel français fait depuis toujours figure de
pionnier en matière d'innovation. Du "Queen Mary 2" à
l'Airbus A380 ou au TGV, de la carte à puce aux industries
de la santé, nos ingénieurs ont souvent été parmi les
premiers à découvrir les technologies du futur. Une semaine
avant ma visite aux Etats-Unis, le président George W. Bush
donnait ainsi la France en exemple pour ses choix
visionnaires en matière d'indépendance énergétique. La
victoire dans la compétition internationale pour obtenir le
site d'Iter le prouve : nous avons un potentiel
exceptionnel.
Alors, bien sûr, il faut
que la France se modernise : tout n'est pas toujours rose.
Nous connaissons des difficultés : un taux de chômage trop
important, une situation détériorée de nos finances
publiques, un endettement excessif et le pois des 35 heures.
Comme nos amis américains, nous subissons aussi les effets
de la hausse du prix du pétrole et d'une compétition
internationale toujours plus forte avec des pays qui veulent
conquérir leur place sur la scène internationale.
Mais, dans cette
mondialisation qui parfois nous effraie, nous avons, nous
aussi, de vraies cartes à jouer. A nous de savoir les
utiliser, à nous de capitaliser sur nos atouts. C'est ce que
je me dis dans l'avion qui me ramène à Paris. Peut-être
est-ce cela, finalement, le patriotisme économique./. |